Dans cette monographie, l’unique consacrée à ce jour à Anselm Kiefer, Daniel Arasse s’applique à démontrer le processus de sédimentation, de réélaboration de thèmes qui circulent, s’entrecroisent et se superposent en un véritable « labyrinthe kieferien ». La dimension historique et politique de l’œuvre de Kiefer passionne Arasse et plus particulièrement son statut d’artiste allemand né avant l’achèvement de la guerre. Position à laquelle l’artiste consacra une rare énergie afin de démêler l’écheveau consistant à analyser les possibilités de l’acte créer après l’holocauste. Car à l’instar d’autres artistes allemands mais avec davantage de conscience et d’obstination, Kiefer a questionné son héritage de peintre en révélant les éléments iconographique et mythologique de la culture allemande. Arasse lève le voile et désigne l’œuvre en tant qu’instrument qui transforme les actions ou les architectures en leur permettant d’entrer dans le « théâtre de la mémoire individuelle et collective, au lieu d’agir pernicieusement dans le refoulement de leur souvenir. » Au fil des pages, Daniel Arasse examine les multiples facettes d’une œuvre à la portée universelle, qui sait prendre en compte l’Histoire, les mythes germaniques, grecs, assyriens… la religion, les femmes, la poésie, la mystique juive, en des tableaux, sculptures, livres aux dimensions et à la matière exceptionnelle, avec une prédominance pour le plomb, dont la contemporanéité est indissociable du classicisme.
Normalien, ancien membre de l’Ecole française de Rome, Daniel Arasse (1944 – 2003 a enseigné l’histoire de l’art à l’Université de Parsi Sorbonne. Directeur de l’Institut français de Florence de 1982 à 1989, il a également été directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Il a notamment publié Le Détail ; Pour une histoire rapprochée de la peinture, (Paris 1992) et Léonard de Vinci (Paris 1997).