Renate Graf est hantée par l’ailleurs et son journal dévoile son goût pour l’errance, la dérive, l’expatriation… mais aussi le rêve. Munie de son appareil photographique elle explore, colonise, fixe des instantanés sur les êtres qu’elle croise, les sociétés et les paysages qu’elle découvre.
Au fil des pages, les notes de voyages « impressionnistes » enregistrent les perceptions immédiates de l’artiste qui les agrémente, parfois, de citations d’écrivains dont surgissent le souvenir de lectures, émaillant son récit d’éclats poétiques. Parfois, au gré de ses pérégrinations, elle se remémore les images de certains films, qui s’imposent alors comme une évidence.
Avec la même acuité Renate Graf photographie ses enfants, ses amis, son compagnon, l’artiste Anselm Kiefer, les moments heureux ou mélancoliques. Un journal intime qui échappe cependant au solipsisme, tout en faisant écho à Julien Green qui se demandait « Pourquoi suis-je moi ? ».
Les routes qu’emprunte l’artiste ne sont ni jubilatoires ni euphoriques. Elle se livre simplement à une déambulation nimbée de nostalgie, aux antipodes du bréviaire de l’ethnologue. Ici, point de théâtralisation des sites visités, mais un regard distancié sur les populations locales et, surtout, la transcription de mondes, de formes et de parfums éclectiques qui, à travers l’objectif de Renate Graf, s’applique à capter l’altérité.