Mieux vaut l’annoncer, ce n’est pas tant le travail que sa transformation, sinon sa fin qui ont motivé ma réflexion. Les artistes m’ont très tôt révélé comment le travail pouvait se faire le support d’une autonomie réelle même si relative, permettre la réalisation de l’individu dans son activité et, à plus ou moins long terme, de se voir reconnu par l’autre.
Il m’est apparu dans le même temps que le travail de l’art, depuis la modernité, produisait un lien social spécifique que je ne reconnaissais dans aucune autre activité. Ces constats ont pris forme dans l’observation des œuvres et l’analyse du processus qui les conduit.
J’ai donc voulu fonder ma réflexion sur des « objets » et décidé de l’organiser autour de travaux qui s’avéraient exemplaires, dans un champ politique au sens large, des directions que l’art nous indique et dont je tenais à monter toute la dimension paradigmatique, ils ne constituent pas pour autant des modèles formels.
Plutôt que de présenter un panorama qui aurait balayé en étendue ce que je cherche à approfondir, j’ai préféré livrer au lecteur un corpus délibérément choisi en fonction des modalités du travail qu’il m’importe de valoriser dans le monde d’aujourd’hui. La conviction que le travail de l’art puisse indiquer des directions à venir pour la société m’a animée.
L'auteure
Ancienne pensionnaire de l’Académie de France à Rome-Villa Médicis, Catherine Strasser est historienne de l’art et critique d’art. Elle a consacré de nombreux essais à l’art moderne et contemporain et crée en 1997 la revue le travail de l’art, publication consacrée aux écrits d’artistes de toutes disciplines. Elle est actuellement professeure à l’Ecole nationale des arts décoratifs de Paris.